Denis Huisman et le rêve d’Icart
L’histoire de l’Icart est une histoire française. Aujourd’hui école certifiée par l’Etat, membre du Groupe EDH spécialisé formations supérieures pragmatiques dans les domaines de la communication avec l’EFAP (l’école des nouveaux métiers de la communication) et l’EFJ (l’école des métiers du journalisme), l’Icart est à l’origine l’aventure d’un homme : Denis Huisman. Pionnier des débats entre médiation et management culturels, Denis Huisman fonde en 1963 la 1ère école européenne à préparer aux métiers du commerce de l’art et des idées dans un pays qui se cherche entre savoir et faire savoir, et un continent porteur d’évolution, terra incognita alors à baliser et cartographier : les marchés de la culture.
Plus de 50 ans après, Pierre Corcos, Directeur académique de l’Icart Paris, revient sur cette genèse sociale et humaine sans précédent parmi les écoles du secteur : « Denis Huisman est d’abord le fils de Georges Huisman, qui fut, entre autres, Directeur général des Beaux-arts en 1934 et fondateur du Festival de Cannes en 1939. On peut donc dire qu’il est né dans le sérail ! Mais plus encore, Denis Huisman est quelqu’un pour qui le savoir était une valeur très importante et qui a cherché à le transmettre par ses multiples travaux. Son impressionnante bibliographie en témoigne pour lui… » Pierre Corcos confie son admiration envers un esprit novateur, qui a senti avant certains et mieux que d’autres, un tournant pédagogique majeur à venir en France. « Denis Huisman a d’abord témoigné d’une pensée différente dans ses livres à travers l’esthétique, l’art de la communication, la philosophie, etc. La création de l’Icart dans la France des années 1960, poursuit-il, était donc pour lui la continuation de cet idéal humaniste et intellectuel, afin de sortir de l’élitisme et offrir au plus grand nombre l’accès aux métiers de la culture. » Entrepreneur à l’esprit avant-gardiste doté d’un talent inné pour sentir l’air du temps, Denis Huisman va dès lors aligner sa généalogie, sa bibliographie et son projet pédagogique en un tout cohérent et signifiant. Le pli était pris et l’école lancée…
« Il faut se rappeler le défi que cela représentait, dit Pierre Corcos. A l’époque, on était galeriste de père en fils, éventuellement animateur culturel en passant, parce que venant d’une école d’art dramatique éventuellement, mais il n’existait aucune vraie formation ! » De nos jours, la planète Icart orbite autour d’une savante balance entre apprentissage théorique, cours fonctionnels et stages professionnalisant qui sont autant de carrés d’as pour jouer dans la grande partie du management culturel et du marché de l’art dans un monde désormais globalisé aux possibilités d’emploi et de création démultipliées.
Elaborer de nouvelles façons de faire vivre la culture à l’ère numérique
A ce titre, l’Icart a dû au fil du temps adapter son programme pédagogique afin de répondre aux besoins des futurs professionnels du monde des arts et de la culture. Comme l’explique Valérie Guibert, ancienne élève de l’école et Directrice des études à Icart Paris : « notre formation à l’Icart se décompose en deux cycles. Un cycle de trois ans complété d’un cycle de deux ans préparant soit au MBA spécialisé Marché international de l’art, soit au MBA Ingénierie Culturelle et Management. Avec des stages d’intégration et professionnalisant en entreprise à chaque étape de notre cursus, en France ou à l’étranger. »
Une approche responsabilisante qui met le doigt sur la pratique active de métiers à valeur ajoutée qui, s’ils font rêver les jeunes par leur capacité à « enchanter » un cadre de travail au quotidien, n’en sont pas moins de vrais challenges où l’étudiant doit autant savoir manager le côté humain que se montrer apte à relever le défi des nouvelles formes de communication globalisée que sont le numérique, les médias sociaux et les outils digitaux. Pour ce faire, Valérie Guibert résume les deux piliers sur lesquels l’Icart s’équilibre : « la polyvalence et le côté pluridisciplinaire de l’enseignement, notre volonté étant de préparer les étudiants à des marchés publics ou privés qui se soucient de plus en plus de questions de médiation culturelle. Par exemple, le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris organise des concerts de jazz, des happenings artistiques, de l’événementiel, etc. » Une formation complète et variée qui se positionne sur l’efficience de la pratique professionnelle et a le mérite de plonger l’étudiant dans le grand bain du commerce de la culture et des arts, sans contrainte théorique inutile via la participation à des ateliers connectés et la réalisation, dès la 1ère année, d’un magazine.
« Concrètement, poursuit Pierre Corcos, nous dispensons à l’Icart un bagage culturel et esthétique et une mise en acte immédiate du savoir appris. » Qu’ils se destinent à intégrer une structure existante ou à fonder leur propre entité professionnelle, les étudiants inscrits ces dernières années à l’Icart semblent aussi aspirer, promotion après promotion, à sortir d’un moule préfabriqué en quête d’un horizon qui fasse sens. Une évolution des mentalités étudiantes qui questionne et redéfinit les raisons même de l’engagement dans le cursus des métiers de l’art et de la culture. A en croire l’expérience de Pierre Corcos, la quête de sens qui s’incarne chez ces jeunes au présent justifie pour beaucoup leur décision d’intégrer l’Icart. « Je me suis dernièrement entretenu avec une étudiante qui se destinait à travailler dans l’hôtellerie et le tourisme, reprend-il. Elle m’a dit : « je préfère gagner moins d’argent, mais faire un travail porteur de sens et d’évolution personnelle, plutôt que tourner en rond rapidement pour un très bon salaire et tomber dans la répétition ! » Des commentaires comme celui-là, je les trouve non seulement passionnants mais aussi de plus en plus récurrents au sein de l’école et, avec le recul qui est le mien, ça m’intéresse énormément. Ils sont symboliques et signifiants. »
Les ailes d’Icart
Parmi les anciens « icartiens », nombreux sont ceux à avoir pris leur envol et déployé leurs ailes sur les domaines pluriels de la culture comme de la scène médiatique et artistique. L’icart publie le chiffre de 3 500 diplômés depuis 1963. Sur ces 3 500, 95 % d’entre eux trouveraient un emploi dans l’année qui suit leur graduation et 25 % travailleraient à l’international. Il faut ajouter qu’avec 30 partenaires universitaires dans le monde et 2 300 étudiants sur deux campus (Paris et Bordeaux) plus une antenne Icart à New York rendue possible grâce à l’université New York Institute of Technology, l’Icart bénéficie d’un réseau d’alliés et d’anciens organisé, efficace et autonome.
Nous avons interrogé l’un de ces anciens, diplômé de l’Icart en 2004 et actuellement chargé de relations publiques dans le secteur de la mode. Passionné de voyages et de rencontres, il a confié son expérience de l’école : « j’avais choisi l’Icart pour son aspect novateur et son approche transversale dans l’apprentissage de la diffusion et la commercialisation des arts et de la culture. L’Icart avait cet avantage pour moi de proposer une formation professionnalisante sur 3 ans. Et très variée dans son programme ! J’y ai appris dans des domaines aussi diversifiés que l’art étrusque, la danse, la musique contemporaine, etc. Lors de la 1ère année, en recherche de stage, j’ai eu l’opportunité d’entrer chez Dior Homme à l’époque où Hedi Slimane était Directeur artistique. Sa vision de la mode, sa manière de définir son univers pour contaminer tous les territoires alentour, j’ai vraiment trouvé ça fascinant ! C’est cette rencontre qui m’a décidé à m’orienter dans un métier de communication autour de la mode et de ceux qui la créent. » Un rendez-vous esthétique décisif dans la vie de l’ancien étudiant, qui va pousser sa chance et suivre son étoile. Il explique : « la mode n’était pas un but en soi pour moi, je m’intéresse d’ailleurs à plein de domaines qui n’en font pas partie. Les vêtements qui me séduisent restent simples. Être dans les relations publiques m’a surtout permis de faire des rencontres humaines incroyables, de nouer des liens très forts avec certains créateurs. Je voyage, je m’interroge et tout cela crée du sens pour moi. Qui sait où tout cela me conduira demain ? »
A voir les données, on s’aperçoit que la passion rejoint la raison dans des secteurs dynamiques et créateurs d’emplois : l’industrie culturelle est en effet le 3e employeur européen. Quant au marché de l’art en France, il est le 4e au monde. Dans un contexte favorable en expansion constante, comment ne pas voir dans ce témoignage les signaux positifs d’une vraie synergie entre les arts, la culture, la communication et la cible finale de toute entreprise intellectuelle : les hommes ? Un objectif qui dépasse et transcende la dimension sèche des domaines de la culture pour atteindre une dimension humaine et collective. Pierre Corcos de conclure : « c’est l’héritage de Denis Huisman. En tant que philosophe, dès les débuts en 1963, ce dernier avait la vision d’une école professionnelle, certes au service des savoirs en tant que canal éducatif, mais encore et surtout avec la valeur suprême de partager et transmettre « les clés de l’Olympe » dans un but utilement humaniste. »
(Icart, école de médiation culturelle et du marché de l’art, Groupe EDH, http://www.icart.fr/ ; tous visuels copyright Stéphane Chemin)