Faisons un test : renversons les paramètres du phénomène. Après les millions de « coming-out » du mouvement gay depuis 20 ans, et désormais en voie de banalisation, les médias n’avaient plus rien de pseudo déviant à se mettre sous la quenotte. Puis, soudain, le dieu de la Presse créa la femme cougar. Alleluia !
Mais si, au lieu de nous esbaudir avec le troupeau, à grand coup de « Oh ! » interloqués ou de « Ah ! » admiratifs, sur ces femmes qui, soi-disant, « osent », nous regardions l’envers du décor, que verrions-nous ?
Anne Bancroft et Dustin Hoffman dans « Le Lauréat », film de Mike Nichols
Toy boys, lionceaux ou cub, voire même gigolos, le vocabulaire pour décrire les jeunes hommes recherchés par les femmes cougars laisse transparaître tout le mépris d’une morale passéiste aux relents puritains. Comme l’expliquent de façon croisée une poignée de psychologues et sociologues britanniques : « … La nouveauté, ce n’est pas l’expression exacerbée de ce désir féminin mature, qui toucherait jusqu’à 25 % des femmes anglaises, mais plutôt le fait qu’il trouve un écho de plus en plus large dans la population masculine ! ». Car le hic, Messieurs, c’est bien le consentement délibéré des jeunes hommes. Mieux encore, leur authentique attirance envers ces femmes mûres.
Lancé début 2010, le site « allocougar.com » en est aujourd’hui un symptôme quantifié. Gratuit pour les femmes, il est payant pour les hommes. Or… 80 % des nouveaux inscrits sont justement des hommes ! Alors que, de leurs côtés, les femmes sont encore frileuses à afficher ouvertement leur recherche. Et la déferlante se poursuit en Espagne, France, Italie, Allemagne, etc.
Pour ceux qui aiment les statistiques, même si on peut leur faire dire n’importe quoi : 44 % des hommes interrogés n’ont aucun a priori à s’afficher avec une femme plus âgée. D’ailleurs, 30 % d’entre eux se verraient bien entamer une relation sérieuse avec une femme mature. De leur côté, les femmes sont seulement 6 % à envisager une histoire sérieuse avec un junior !
Alors, en fait de prédatrices, on repassera…
Eh oui, force est d’admettre, n’en déplaise aux tenants obstinés d’un conservatisme bourgeois de bon ton (largement parfumé à la naphtaline), la gente masculine en redemande. De 25 à 40 ans, l’écrasante majorité des hommes attirés par ces femmes plus âgées ont tous, certes, leurs propres motivations mais une attitude commune : l’ouverture d’esprit et l’envie de l’expérience. Jugez plutôt ces opinions prises sur le vif…La vie amoureuse et sexuelle d’une société est toujours le miroir de ses mutations les plus vitales. On touche à l’intimité d’un groupe, à sa perpétuation, donc à son devenir. Toute redéfinition de ce cadre essentiel traduit la naissance d’une métamorphose irrémédiable.
Huguette Duflos et Jaque Catelain dans « Le Chevalier à la Rose » – Extrait de « Sex and the City »
Si vous placez frontalement la vague homosexuelle de ces 20 dernières années avec la tendance hyper-récente des femmes cougars, l’énergie dégagée pulvérise la cellule familiale au sens procréatif du terme. Nous assistons ici, au-delà de l’affligeante surenchère médiatique, et malgré la récupération marketing inévitable du phénomène, à l’éclatement de bon nombre de clichés et à l’avènement d’une époque toute neuve. Que sera-t-elle ? Evidemment, ce que nous en ferons tous, ou plutôt chacun de nous individuellement. Et c’est d’ailleurs dans cet adverbe que se cache le germe de l’avenir : l’individu, sa liberté et les forces inédites et épanouissantes cachées au fond de lui… et qui ne jaillissent qu’après s’être débarrassé du poids des tabous !
