Son dernier pavé (575 pages replètes), « La Formule de Dieu », roman d’aventures à thèses, vient d’être traduit chez HC éditions, et possède tout du bestseller à forte valeur pelliculée…Les plumitifs du Bookreporter le rapprochent, sans originalité mais avec emphase, des archi-connus et archi-antagonistes Umberto Eco/Dan Brown. Une comparaison toute marketing, qui a de quoi faire sourciller le prudent lecteur…
Evoquons de but en blanc le duo Kleinmann et Vinson, ou Henri Loevenbruck, dont les excellents romans respectifs nous plongent chacun dans la traque d’une vérité…monumentale.
Car, avec cette « Formule de Dieu », nous sommes en présence de ce que nos confrères anglo-saxons nomment, un pageturner novel. Entendez un livre qu’on ne lâche qu’à la fin. A ce petit jeu, José Rodrigues dos Santos n’est pas le plus manchot. Il faut dire, aussi, que son sujet est des plus ambitieux. Il y compose une enquête à cheval sur trois continents et y défend un postulat impossible : prouver l’existence de Dieu grâce à une formule. Son héros, Tomàs Noronha, s’y trouve « forcé » de décrypter un document sensible, manuscrit apocryphe d’Albert Einstein appelé à bouleverser le statu quo établi pour la paix des contrées entre physique, espace/temps et religion. De là, s’imbriquent rebondissements et retournements de situations propres à écheveler l’amateur d’énigmes !
Sur une trame ardue, voire rédhibitoire, l’auteur vulgarise les données, et remplit finalement le contrat que se devrait d’honorer tout créateur d’histoires : élever son public.
A son instar, poussons la curiosité en filigrane : la « sérialité » ou Loi des Séries est un domaine scientifique déjà ancien, mais encore frileusement exploré.
Un des premiers chercheurs à s’y être intéressé est le biologiste autrichien Kammerer (1880-1926) auquel Arthur Koestler consacra d’ailleurs un ouvrage (Les racines du hasard, Calmann-Lévy, 1972). Ce scientifique essaya de démontrer que les choses, et les événements de même nature, ont tendance à se regrouper, formant ainsi des agrégats appelés, bien plus tard, « clusters ». C’est aussi laloi du semblable où « le semblable va avec le semblable », notion nommée par les philosophes depuis Aristote, « Principe d’Empédocle ».
Pour Kammerer, donc, les lois des séries sont la manifestation d’un principe universel de la nature, opérant indépendamment de toute causalité physique.
Ainsi que l’a écrit Sir James Jeans, physicien, astronome et mathématicien :
« … Aujourd’hui, on considère généralement, et chez les physiciens presque à l’unanimité, que le courant de la connaissance nous achemine vers une réalité non mécanique ; l’univers commence à ressembler plus à une grande pensée qu’à une grande machine… »
Qu’est-ce que le temps ? Qu’est-ce que la matière ? Qu’est-ce que Dieu ?
En mars 1955, alors que son ami, Michele Besso, venait de décéder, Einstein écrivit une lettre d’encouragement à sa famille « …Maintenant, il a quitté cet étrange monde un peu avant moi. Cela ne signifie rien. Des gens comme nous, qui croyons en la physique, savons que la distinction entre passé, présent et futur n’est seulement qu’une illusion obstinément persistante… ».
Ces propos, véridiques, ne sauraient dépareiller les thèses oniriques que soutient « La Formule de Dieu ». On a l’impression d’un volume des aventures de Tintin, dans lequel seraient convoqués les figures tutélaires de Stephen Hawking, Fritjof Capra et James Bond.
Et puis, pour ceux qui n’ont pas la foi, qui se plaindrait de sauter de Téhéran à Lhassa en deux tours de pages ?
(« La Formule de Dieu » de José Rodrigues dos Santos, HC éditions, sortie Juillet 2012, 600 pages, 22€)